“A quoi sert d’être cultivé ? A habiter des époques révolues et des villes où l’on n’a jamais mis les pieds. A vivre les tragédies qui vous ont épargné, mais aussi les bonheurs auxquels vous n’avez pas eu droit. A parcourir tout le clavier des émotions humaines, à vous éprendre et vous déprendre. A vous procurer la baguette magique de l’ubiquité. Plus que tout, à vous consoler de n’avoir qu’une vie à vivre. Avec, peut-être, cette chance supplémentaire de devenir un peu moins bête, et en tout cas un peu moins sommaire.”

Mona Ozouf, historienne, auteur de La Cause des livres (Gallimard)


Existant grâce à une idée de Nicolas I, à l'aide avisée de David, Michel et Nicolas II (merci à ces quatre mousquetaires !), ce blog permet de proposer et partager des lectures. Après une rage monomaniaque autour de la nouvelle, le blog tente une percée en direction du roman-fleuve. Ce genre fera l'objet d'une rencontre amico-littéraire à une date non encore précisée. D'ici là, d'ici cette promesse d'ouverture, écoute et échanges, proposons des titres, commentons les livres déjà présentés, dénichons des perles, enrichissons la liste conséquente des recueils de nouvelles.


Chers amis, chers lecteurs gourmands, je loue et vous remercie de votre appétit jubilatoire sans quoi cette petite entreprise serait vaine.

Bonne lecture à tous et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Isabelle

jeudi 23 janvier 2014

Le chasseur de têtes

Auteur : Timothy Findley (1930-2002)

Traduction de l'anglais (canadien) de Nésida Loyer.
Éditions Gallimard, Collection Folio.



Je me suis dépêchée -vite, vite, vite- de finir ce long roman chargé pour ne pas rester en contact avec Kurtz, l'un des personnages principaux, un être échappé d'une page d'un livre, un être à l'âme noire comme le charbon et à l'action malfaisante.
Timothy Findley fut d'abord acteur et, en tant qu'acteur, il joua Shakespeare. Les âmes les plus viles de Shakespeare se retrouvent dans cette oeuvre foisonnante où l'on côtoie également la maladie, la folie, la folie, la maladie, la folie, la noirceur, la folie, le vice, la folie, le vice, le vice, le vice répugnant, mais aussi la bonté et des personnes dont le sens de l'éthique tient bon malgré tout.
La description de la ville envahie par les oiseaux malades est fascinante. Est-on dans la réalité ? Oui, non, non, oui. L'écriture est immense, débordante, d'une énergie dévastatrice. Ça souffle, ça dérange, ça secoue. On plonge dans les ténèbres. Où est-on ? Où est la lumière ? Heureusement, il y a les fous. Heureusement, il y a les fous. Les fous. Les fous qui sauvent de la folie.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Timothy_Findley

http://www.babelio.com/auteur/Timothy-Findley/2853

http://www.liberation.fr/culture/2002/06/24/la-porte-s-est-refermee-sur-timothy-findley_408106

http://leserpentaplumes.com/Le-chasseur-de-tetes_oeuvre_4767.html



mardi 21 janvier 2014

L'amour d'une honnête femme

Auteur : Alice Munro (1931-)

Traduit de l'anglais (Canada) par Geneviève Doze
Éditions de l'Olivier. Collection Signatures.

À nouveau je m'écrie "Merci le Nobel ! Merci le Nobel !", distinction dont les feux littéraires de 2013 m'ont permis de découvrir cette écrivain canadienne. Frère lecteur, soeur lectrice, ne passe pas à côté de la délicieuse vieille dame indigne.
Chacune des huit nouvelles de ce recueil m'a semblé aussi dense qu'un roman, aussi fouillée, aussi riche. On y côtoie bien l'amour promis dans le titre, bien sûr pas celui des romans-photos ni de la collection Harlequin, plutôt l'amour interrogatif, résigné ou déçu de femmes qui se sont perdues sur son chemin hasardeux, son chemin semé de pièges aussi nombreux qu'imprévisibles -ou tout au moins imprévus.
À l'image de de ce chemin, l'auteur ose une écriture labyrinthique. On musarde, on s'attarde en détours, on risque l'impasse, on procède tout à la fois par approches et évitements, on trouve des issues, on est invité à poursuivre seul dans les sublimes méandres de cette écriture onirique. Et, de fait, il est de nombreuses fois question de rêves, de manière anecdotique quand l'un des personnages indique qu'il "ne rêve pas" ou de manière prioritaire quand l'une des nouvelles débute par la narration de l'un d'eux ou quand une énigme se rattache directement à des rêves perturbants, des visions à la Jérôme Bosch. Dans la proximité avec les rêves, les histoires fictionnelles et les livres sont un des thèmes de ces nouvelles. Deux des personnages sont bibliothécaires, l'une lit de façon dévorante et souhaite devenir écrivain.
Avec ce livre, on est de plein pied dans la réalité, mais un autre plan existe, très présent, celui de l'inconscient. Symbole fort de l'inconscient, l'eau est très souvent présente. Et en effet, le style d'Alice Munro m'a semblé ressembler à l'eau sous toutes ses formes, active et vive comme celle d'un torrent, stagnante comme celle d'une mare ou encore paisible tel un lac, pleine de tours et tourbillons, s'infiltrant partout. Les hommes sont souvent géologues ou paysans. Ainsi, la terre et l'eau, éléments féminins, sont constants.

Dans ces histoires à la fois banales et uniques, les personnages étonnent par l'intimité qu'ils nous dévoilent. Nous sommes très rapidement dans leur proximité, et pour moi dans leur cercle affectif. Les détails sont ceux d'une artiste à la sensibilité exacerbée, à l'humanité vibrante. À la fois très travaillé et d'une écriture d'une grande fluidité, ce livre m'a très profondément touchée. Courez, volez !


Vous trouverez ce-dessous des critiques dont certaines émanant de lecteurs sont à l'opposé des miennes.

http://www.telerama.fr/livres/alice-munro,103592.php

http://www.franceculture.fr/oeuvre-l-amour-d-une-honnete-femme-de-alice-munro

http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20131010.OBS0664/le-nobel-de-litterature-2013-s-appelle-alice-munro.html

http://www.babelio.com/livres/Munro-LAmour-dune-honnete-femme/47893

http://www.marieclaire.fr/,l-amour-d-une-honnete-femme-d-alice-munro,20158,635773.asp

http://liliba.canalblog.com/archives/2013/01/08/26023424.html

http://www.lecerclepoints.com/livre-amour-honnete-femme-alice-munro-9782757830185.htm

http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/10/10/le-nobel-de-litterature-est-decerne-a-alice-munro_3493589_3214.html