Auteur : Robert Merle (1908-2004)
Édition : Livre de poche.
13 tomes, 6 400 pages. Pour lire une telle saga jusqu’au bout, il faut y trouver du plaisir ; sinon, on abandonne en cours de route.
Pourquoi j’aime Fortune de France ? Les raisons sont si nombreuses qu’elles se bousculent de sorte que, voulant toutes les exprimer d’un seul coup, je risque d’en oublier la plupart. Je vais tacher de les expliciter un peu, ce qui risque de déboucher sur un inventaire à la Prévert, sans queue ni tête, tant il est impossible de les hiérarchiser.
Assez de préambule : allons-y !
Je n’aime pas les auteurs paresseux, et encore moins ceux qui prétendent l’être, voulant nous faire croire que l’écriture est quelque chose de facile et qu’écrivain est le plus beau métier du monde, le seul où l’on ait l’impression d’être toujours en vacances.
Robert Merle impressionne dès les premières lignes par le travail considérable, on le sent, qu’il a dû réaliser pour reconstituer la langue de l’époque. Les mots, les phrases, les sons (mais aussi, magie de la langue, les odeurs, les goûts…) : tout est là pour nous immerger complètement. A tel point d’ailleurs qu’on se surprend à rêver en ancien français, à employer des expressions étranges (se « ramentevoir » pour se souvenir, « s’acoiser » pour se taire, les « drôles » pour les garçons, les « garces »… pour les filles, etc.).
Outre l’aspect linguistique, j’aime l’histoire en elle-même, avec un petit « h ». Fortune de France est une saga familiale qui couvre 3 générations. A chaque génération, on suit en particulier un membre de la famille De Siorac, au départ une petite noblesse de province… qui va prendre du galon au fil des tomes et des générations, à mesure que les personnages rendent des services à leurs rois successifs. Les personnages sont attachants et suscitent de la tendresse, de l’admiration… ou au contraire de la haine pour certains (comme le clan Médicis par exemple). Aventure, action, réflexion, intrigues, amours (très libérées !), tout est là pour nous rendre accros.
D’ailleurs, j’ai avalé les huit premiers tomes en 1 mois.
Mais la langue et l’histoire ne sont pas tout : j’aime l’Histoire, avec un grand « H » ce coup-ci, telle qu’elle est racontée par Robert Merle au fil de cette saga. On sent, là aussi, qu’il a fallu un travail de recherche considérable. Pour cette remarquable reconstitution, quelques personnages de fiction nous guident, mais cela ne nous empêche pas de saisir les enjeux de l’époque, bien au contraire (« bien le rebours », comme on disait à l’époque).
Le point de vue est d’ailleurs particulièrement intéressant. Alors que bien souvent les romans historiques ou les biographies se concentrent sur les personnages centraux de l’Histoire – en général des chefs d’Etat – Fortune de France nous livre ici un point de vue décentré : celui de la petite noblesse de province (qui va aussi monter à Paris). Cela nous permet de nous familiariser avec la vie des gens ordinaires, des gueux, des petits bourgeois, des nobles, des rois, sans oublier les gens de robe puisque la religion occupe une place centrale dans le récit. La période couverte par la saga s’étend de la mort de François 1er (1547) et s’achève à la mort de Mazarin, qui marque le début du règne de Louis XIV (1661).
Cette période très troublée est marquée par les guerres de religion qui opposent les catholiques et la minorité protestante. Sur fond d’intolérance, de persécution, de massacres, mais aussi de tentatives de réconciliation, on suit les intrigues des fanatiques, tout-puissants, et de quelques (rares) humanistes. Le peuple, lui, complètement abruti et fanatisé par les prêtes, suit sans se poser de question.
Enfin, dernier registre sur lequel j’aime Fortune de France. C’est un excellent traité d’histoire des sciences et des techniques. On voit en particulier comment la médecine a émergé en abandonnant peu à peu la superstition et la pensée magique, ainsi qu’en s’affranchissant du discours des anciens, remplacé par une méthodologie plus scientifique, faite d’observation et d’expérimentation. Pour cet aspect, le tome 2 est particulièrement remarquable.
Il y a sans doute beaucoup d’autres raisons d’aimer la saga Fortune de France. Pour les découvrir, une seule solution : lisez-la !
Pourquoi j’aime Fortune de France ? Les raisons sont si nombreuses qu’elles se bousculent de sorte que, voulant toutes les exprimer d’un seul coup, je risque d’en oublier la plupart. Je vais tacher de les expliciter un peu, ce qui risque de déboucher sur un inventaire à la Prévert, sans queue ni tête, tant il est impossible de les hiérarchiser.
Assez de préambule : allons-y !
Je n’aime pas les auteurs paresseux, et encore moins ceux qui prétendent l’être, voulant nous faire croire que l’écriture est quelque chose de facile et qu’écrivain est le plus beau métier du monde, le seul où l’on ait l’impression d’être toujours en vacances.
Robert Merle impressionne dès les premières lignes par le travail considérable, on le sent, qu’il a dû réaliser pour reconstituer la langue de l’époque. Les mots, les phrases, les sons (mais aussi, magie de la langue, les odeurs, les goûts…) : tout est là pour nous immerger complètement. A tel point d’ailleurs qu’on se surprend à rêver en ancien français, à employer des expressions étranges (se « ramentevoir » pour se souvenir, « s’acoiser » pour se taire, les « drôles » pour les garçons, les « garces »… pour les filles, etc.).
Outre l’aspect linguistique, j’aime l’histoire en elle-même, avec un petit « h ». Fortune de France est une saga familiale qui couvre 3 générations. A chaque génération, on suit en particulier un membre de la famille De Siorac, au départ une petite noblesse de province… qui va prendre du galon au fil des tomes et des générations, à mesure que les personnages rendent des services à leurs rois successifs. Les personnages sont attachants et suscitent de la tendresse, de l’admiration… ou au contraire de la haine pour certains (comme le clan Médicis par exemple). Aventure, action, réflexion, intrigues, amours (très libérées !), tout est là pour nous rendre accros.
D’ailleurs, j’ai avalé les huit premiers tomes en 1 mois.
Mais la langue et l’histoire ne sont pas tout : j’aime l’Histoire, avec un grand « H » ce coup-ci, telle qu’elle est racontée par Robert Merle au fil de cette saga. On sent, là aussi, qu’il a fallu un travail de recherche considérable. Pour cette remarquable reconstitution, quelques personnages de fiction nous guident, mais cela ne nous empêche pas de saisir les enjeux de l’époque, bien au contraire (« bien le rebours », comme on disait à l’époque).
Le point de vue est d’ailleurs particulièrement intéressant. Alors que bien souvent les romans historiques ou les biographies se concentrent sur les personnages centraux de l’Histoire – en général des chefs d’Etat – Fortune de France nous livre ici un point de vue décentré : celui de la petite noblesse de province (qui va aussi monter à Paris). Cela nous permet de nous familiariser avec la vie des gens ordinaires, des gueux, des petits bourgeois, des nobles, des rois, sans oublier les gens de robe puisque la religion occupe une place centrale dans le récit. La période couverte par la saga s’étend de la mort de François 1er (1547) et s’achève à la mort de Mazarin, qui marque le début du règne de Louis XIV (1661).
Cette période très troublée est marquée par les guerres de religion qui opposent les catholiques et la minorité protestante. Sur fond d’intolérance, de persécution, de massacres, mais aussi de tentatives de réconciliation, on suit les intrigues des fanatiques, tout-puissants, et de quelques (rares) humanistes. Le peuple, lui, complètement abruti et fanatisé par les prêtes, suit sans se poser de question.
Enfin, dernier registre sur lequel j’aime Fortune de France. C’est un excellent traité d’histoire des sciences et des techniques. On voit en particulier comment la médecine a émergé en abandonnant peu à peu la superstition et la pensée magique, ainsi qu’en s’affranchissant du discours des anciens, remplacé par une méthodologie plus scientifique, faite d’observation et d’expérimentation. Pour cet aspect, le tome 2 est particulièrement remarquable.
Il y a sans doute beaucoup d’autres raisons d’aimer la saga Fortune de France. Pour les découvrir, une seule solution : lisez-la !
Vous trouverez grâce à ce lien l'émission qui a été diffusée en 1950 et qui interrogeait Robert Merle :
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