Auteur : Alice Munro (1931-)
Traduit de l'anglais (Canada) par Geneviève Doze
Éditions de l'Olivier. Collection Signatures.
À nouveau je m'écrie "Merci le Nobel ! Merci le Nobel !", distinction dont les feux littéraires de 2013 m'ont permis de découvrir cette écrivain canadienne. Frère lecteur, soeur lectrice, ne passe pas à côté de la délicieuse vieille dame indigne.
Chacune des huit nouvelles de ce recueil m'a semblé aussi dense qu'un roman, aussi fouillée, aussi riche. On y côtoie bien l'amour promis dans le titre, bien sûr pas celui des romans-photos ni de la collection Harlequin, plutôt l'amour interrogatif, résigné ou déçu de femmes qui se sont perdues sur son chemin hasardeux, son chemin semé de pièges aussi nombreux qu'imprévisibles -ou tout au moins imprévus.
À l'image de de ce chemin, l'auteur ose une écriture labyrinthique. On musarde, on s'attarde en détours, on risque l'impasse, on procède tout à la fois par approches et évitements, on trouve des issues, on est invité à poursuivre seul dans les sublimes méandres de cette écriture onirique. Et, de fait, il est de nombreuses fois question de rêves, de manière anecdotique quand l'un des personnages indique qu'il "ne rêve pas" ou de manière prioritaire quand l'une des nouvelles débute par la narration de l'un d'eux ou quand une énigme se rattache directement à des rêves perturbants, des visions à la Jérôme Bosch. Dans la proximité avec les rêves, les histoires fictionnelles et les livres sont un des thèmes de ces nouvelles. Deux des personnages sont bibliothécaires, l'une lit de façon dévorante et souhaite devenir écrivain.
Avec ce livre, on est de plein pied dans la réalité, mais un autre plan existe, très présent, celui de l'inconscient. Symbole fort de l'inconscient, l'eau est très souvent présente. Et en effet, le style d'Alice Munro m'a semblé ressembler à l'eau sous toutes ses formes, active et vive comme celle d'un torrent, stagnante comme celle d'une mare ou encore paisible tel un lac, pleine de tours et tourbillons, s'infiltrant partout. Les hommes sont souvent géologues ou paysans. Ainsi, la terre et l'eau, éléments féminins, sont constants.
Dans ces histoires à la fois banales et uniques, les personnages étonnent par l'intimité qu'ils nous dévoilent. Nous sommes très rapidement dans leur proximité, et pour moi dans leur cercle affectif. Les détails sont ceux d'une artiste à la sensibilité exacerbée, à l'humanité vibrante. À la fois très travaillé et d'une écriture d'une grande fluidité, ce livre m'a très profondément touchée. Courez, volez !
Vous trouverez ce-dessous des critiques dont certaines émanant de lecteurs sont à l'opposé des miennes.
http://www.telerama.fr/livres/alice-munro,103592.php
http://www.franceculture.fr/oeuvre-l-amour-d-une-honnete-femme-de-alice-munro
http://bibliobs.nouvelobs.com/actualites/20131010.OBS0664/le-nobel-de-litterature-2013-s-appelle-alice-munro.html
http://www.babelio.com/livres/Munro-LAmour-dune-honnete-femme/47893
http://www.marieclaire.fr/,l-amour-d-une-honnete-femme-d-alice-munro,20158,635773.asp
http://liliba.canalblog.com/archives/2013/01/08/26023424.html
http://www.lecerclepoints.com/livre-amour-honnete-femme-alice-munro-9782757830185.htm
http://www.lemonde.fr/europe/article/2013/10/10/le-nobel-de-litterature-est-decerne-a-alice-munro_3493589_3214.html