Auteur : Ernest Hemingway (1899-1961)
Au soir de sa vie, après avoir été présent et actif sur le théâtre de toutes les guerres de son temps, après avoir miraculeusement échappé à tant d'accidents et de blessures, Ernest Hemingway réceptionne une malle contenant des écrits perdus depuis très longtemps. Ces textes revenants lui permettent de rédiger le dernier ouvrage de sa vie, qui sera publié post mortem. Hemingway y revient sur sa vie de bohème à Paris, dans les années vingt. Il est, à cette époque heureuse, marié à Hadley de qui il a un fils. Le couple fait vaillamment face aux problèmes d'argent. Il faut monter du charbon quand on en a. On grelotte quand il n'y en a pas. On va à Enghien pour jouer aux courses et tenter de se refaire. Si les Hemingway ont quelques sous de côté, ils se réfugient en montagne durant l'hiver. Là encore, le bonheur parcourt les pages, éclatant dans la neige étincelante, dans la découverte émerveillée du ski.
Mais ce n'est qu'après avoir vécu que l'on se rend compte de la jeunesse et du bonheur qui ont fui. Ernest qui n'est alors pas encore Hemingway et a à construire son métier et son statut d'écrivain, sillonne Paris à pied. Soutenu sans faille par Hadley, il passe ses journées dans les cafés parisiens où il écrit, écrit et écrit encore. Centré sur sa vocation et la recherche de son style, il laisse s'échapper l'amour si généreux dont il fait l'objet. Et ce livre que l'on croyait être un hymne au Paris de la fête, des lumières qui clignotent, de la joie qui brille et est un brin superficielle, est en fait un chant d'extase nostalgique à l'amour perdu. Dans les mots qui redonnent vie, qui en recréent l'écrin, quelle mélancolie, quelle tendresse, quelle tristesse parfois ! Hemingway a une façon unique de parler au lecteur, sans affectation ni complaisance, dans une apparente simplicité qui touche très profondément. C'est déchirant. S'il a sillonné Paris, il a sillonné également son âme et c'est bien là le livre de quelqu'un qui a vécu et qui connait et l'ivresse et les souffrances de la vie.
J'avais, comme des dizaines de milliers d'autres, acheté ce livre après les attentats de novembre 2015. Je ne l'ai dévoré qu'il y a quelques semaines, après avoir ouvert au hasard une page et lu tout haut pour aider Michel à s'endormir. Effet immédiat sur Michel, l'autre conséquence étant que j'ai été happée par cette écriture, hop ! d'un coup harponnée, aimantée par l'alliage de ce qui se présente parfois comme des bribes de reportage et de la dimension intime de cette magnifique écriture.
Dans "La compagnie des auteurs", France Culture a consacré quatre émissions à cet auteur, la dernière tout spécialement sur Paris est une fête.
Isabelle
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