Editions Gallimard
Ainsi donc un fils qui n'a jamais posé de questions à son père, son père étant arrivé à la fin de sa vie, étant mort même, écrit un livre à la mémoire de ce père aviateur, un livre relatant ce que fut l'exaltant et ignoble 20e siècle à la lumière de l'aventure aéronavale.
L'auteur tricote patiemment les bribes de souvenirs et des rares confidences paternelles avec les faits tangibles de la grande Histoire pour composer ce livre inclassable. Roman, oui sans doute, mais aussi monument d'amour. Monument d'amour et de piété filiale, oui assurément, mais encore réflexion philosophique sur le temps qui passe et qui efface, sur la mémoire, sur le sens de la vie et de la mort, sur l'impossible vérité des mots et du récit.
Ce livre m'a fait irrésistiblement penser au Thomas Mann de La Montagne magique par cette manière de revenir encore et encore sur le fait et surtout sur l'abîme de réflexions qu'il inspire. Je suis particulièrement sensible à cette écriture du vertige et du creusement en ce qu'elle témoigne du souci d'honnêteté et de profondeur de l'auteur.
Outre Thomas Mann, Le siècle des nuages m'a également fait penser à ce monument d'Amos Oz, Une histoire d'amour et de haine, par ce besoin irrépressible de mettre tout son talent, sa pudeur et son impudeur pour raconter l'épopée de la famille de l'auteur.
Une fois encore -quel plaisir troublant !-, j'ai compris que je lisais le bon livre au bon moment et au bon endroit. Alors que Philippe Forest en était à parler du lieu de vie de son père toujours parti et qu'il avançait l'idée que son père habitait dans les nuages, dans la beauté fulgurante des nuages au coucher du soleil, le soleil se couchait. Du 12e étage de l'immeuble de Berlin situé sur Alexanderplatz dont nous louions un studio pour la semaine, je levai la tête pour supporter la magnifique poésie des mots de l'auteur, souffler un peu, permettre à l'émotion de retrouver son lit. Je vis alors un avion décoller de l'aéroport berlinois puis traverser une ondulation de nuages orange et violine beaux à couper le souffle.
Moi qui suis sensible au style, je me suis pourléché les babines de cette écriture qui m'a semblé ciselée pour exprimer le meilleur. Ce Philippe Forest, c'est l'intelligence et le coeur réunis. Quel bouleversement que ce livre... Plus d'une semaine après l'avoir terminé, j'ai du mal à commencer autre chose.
N'hésitez pas à écouter Philippe Forest (premier lien). J'aime aussi particulièrement le 2e lien malgré l'injonction de son titre.
http://www.dailymotion.com/video/xe2mmu_philippe-forest-le-siecle-des-nuage_newshttp://www.dailymotion.com/video/xe1isj_ce-qu-il-faut-lire-le-siecle-des-nu_creation
http://wodka.over-blog.com/article-philippe-forest-le-siecle-des-nuages-56336250.html
http://www.telerama.fr/livres/philippe-forest-le-siecle-des-nuages,59086.php
http://www.franceculture.com/oeuvre-le-siecle-des-nuages-de-philippe-forest.html
http://www.lexpress.fr/culture/livre/extrait-du-siecle-des-nuages-par-philippe-forest_905224.html
http://fr.wikipedia.org/wiki/Philippe_Forest
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