“A quoi sert d’être cultivé ? A habiter des époques révolues et des villes où l’on n’a jamais mis les pieds. A vivre les tragédies qui vous ont épargné, mais aussi les bonheurs auxquels vous n’avez pas eu droit. A parcourir tout le clavier des émotions humaines, à vous éprendre et vous déprendre. A vous procurer la baguette magique de l’ubiquité. Plus que tout, à vous consoler de n’avoir qu’une vie à vivre. Avec, peut-être, cette chance supplémentaire de devenir un peu moins bête, et en tout cas un peu moins sommaire.”

Mona Ozouf, historienne, auteur de La Cause des livres (Gallimard)


Existant grâce à une idée de Nicolas I, à l'aide avisée de David, Michel et Nicolas II (merci à ces quatre mousquetaires !), ce blog permet de proposer et partager des lectures. Après une rage monomaniaque autour de la nouvelle, le blog tente une percée en direction du roman-fleuve. Ce genre fera l'objet d'une rencontre amico-littéraire à une date non encore précisée. D'ici là, d'ici cette promesse d'ouverture, écoute et échanges, proposons des titres, commentons les livres déjà présentés, dénichons des perles, enrichissons la liste conséquente des recueils de nouvelles.


Chers amis, chers lecteurs gourmands, je loue et vous remercie de votre appétit jubilatoire sans quoi cette petite entreprise serait vaine.

Bonne lecture à tous et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Isabelle

samedi 5 novembre 2011

Histoires des îles

Auteur : Jack London (1876-1916)

La (re)lecture de ce livre m'a enfin poussée à regarder sur la carte du monde où était située Hawaï. Oh, surprise ! J'ai découvert qu'il s'agissait non pas d'une île mais d'un immense archipel à cheval sur le Tropique du Cancer, en plein milieu de l'Océan Pacifique.
Jack London s'est rendu à de multiples reprises sur ces îles. Sur les traces de Hermann Melville, il y a cherché les origines, cherché le monde d'avant l'arrivée de l'homme blanc. Quand London débarque en 1907, ce monde rêvé est révolu. L'écrivain-voyageur s'enivre pourtant de ce qui en subsiste avant sa complète disparition. Illuminé par l'amour de ces îles, London se laisse aller dans ses écrits à plus de douceur et plus d'optimisme que dans ses écrits précédents.
Enthousiasmée par le recueil de nouvelles Les Tortues de Tasmanie, je me suis sentie encore plus profondément touchée par celui-ci. Il m'a semblé percevoir l'effort sincère et surhumain qu'y accomplit son auteur pour oublier qu'il est inadapté, oublier que les défauts du monde lui pèsent plus qu'à tout autre, oublier sa recherche éperdue et toujours cruellement déçue d'une transcendance, oublier qu'il n'est pas un oiseau, oublier encore qu'une partie de lui est déjà passée de l'autre côté du rideau. A Hawaï, Jack London éprouve un certain repos du corps et de l'âme. Il y est en sursis.
Les nouvelles sont d'inspiration très diverse. Qui accompagnant un vieil homme en lutte avec les grandes pieuvres, qui un détenteur des secrets de sépulture d'une très ancienne famille royale, qui voyant sombrer et ressusciter in extremis un couple "moderne" au terme d'un suspense haletant, qui recueillant la confidence passionnée d'une ancienne jeune fille amoureuse d'un prince flamboyant. Parce qu'il est humaniste, parce qu'il est sensible et qu'il prend des risques, Jack London réussit à nous faire vivre tout près des personnages et ressentir leurs émois. Voilà un auteur qui augmente notre épaisseur humaine, ajoute des personnages à notre cortège et peuple notre néant.
Je suis particulièrement heureuse de la récente réédition des écrits de London. Essayant de ne pas noyer mes chroniques dans les superlatifs, je me sens un peu ligotée. À la relecture, ces lignes me paraissent à la fois un peu artificielles et tièdes. C'est pourtant avec la plus brûlante envie de vous faire lire ce recueil que je termine cette modeste contribution.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Hawa%C3%AF

http://www.lexpress.fr/culture/livre/histoires-des-iles_812554.html

http://www.ecrivains-voyageurs.net/lectures/lectures31.htm