“A quoi sert d’être cultivé ? A habiter des époques révolues et des villes où l’on n’a jamais mis les pieds. A vivre les tragédies qui vous ont épargné, mais aussi les bonheurs auxquels vous n’avez pas eu droit. A parcourir tout le clavier des émotions humaines, à vous éprendre et vous déprendre. A vous procurer la baguette magique de l’ubiquité. Plus que tout, à vous consoler de n’avoir qu’une vie à vivre. Avec, peut-être, cette chance supplémentaire de devenir un peu moins bête, et en tout cas un peu moins sommaire.”

Mona Ozouf, historienne, auteur de La Cause des livres (Gallimard)


Existant grâce à une idée de Nicolas I, à l'aide avisée de David, Michel et Nicolas II (merci à ces quatre mousquetaires !), ce blog permet de proposer et partager des lectures. Après une rage monomaniaque autour de la nouvelle, le blog tente une percée en direction du roman-fleuve. Ce genre fera l'objet d'une rencontre amico-littéraire à une date non encore précisée. D'ici là, d'ici cette promesse d'ouverture, écoute et échanges, proposons des titres, commentons les livres déjà présentés, dénichons des perles, enrichissons la liste conséquente des recueils de nouvelles.


Chers amis, chers lecteurs gourmands, je loue et vous remercie de votre appétit jubilatoire sans quoi cette petite entreprise serait vaine.

Bonne lecture à tous et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Isabelle

dimanche 3 avril 2011

Le régiment part à l'aube

Auteur : Dino Buzzati (1906-1972)

Traduction de Susi et Michel Breitman
Editions Robert Laffont

Dino Buzzati est mort le 28 janvier 1972. Nous habiterions Sannois pour encore trois mois, avant notre déménagement à Saint-Leu la Forêt. C'était un vendredi. J'étais en CE1, à l'école sans doute ce jour-là, peut-être penchée sur un livre de lecture.
Miracle de l'écriture et de la littérature qui me permettent de vivre avec Dino les quelques mois qui précèdent son passage de l'autre côté du rideau. Les nouvelles de ce recueil sont autant d'éblouissantes et bouleversantes variations sur la mort, ou plutôt sur la convocation que donne la mort, convocation à laquelle nul ne peut se soustraire. Quel vertige que cette convocation dont on ne connaît ni le lieu ni la date...
J'ai déniché ce livre dans un bac que mes voisines de la librairie Voyelles disposent parfois sur la rue. Difficile pour moi de résister à l'envie d'y fouiner. Comment ne pas prendre ce hasard pour une première alarme, non, pas une alarme, un rappel plutôt. Un rappel que nous sommes de passage, que la vie est brève et qu'il est urgent de ne pas l'encombrer de futilités et de médiocrité. La tâche est rude, sans cesse à reprendre. La vigilance se nourrit de telles rencontres.
J'ai quasiment lu d'une traite ce livre court et magnifique. Le récit de la recherche de la maman est un sommet inoubliable. J'y pense depuis quelques jours avec une grande émotion. La quatrième de couverture le dit mieux que moi : "Derrière l'apparente retenue, l'impassibilité à la fois inquiétante et ironique de ces récits, l'émotion est tangible. On veut bien croire Buzzati lorqu'il déclare que son "régiment" est prêt à partir. Cet "avis de départ" d'un voyageur immobile ne peut laisser aucun lecteur indifférent. Car là aussi gît l'insondable condition humaine."

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