“A quoi sert d’être cultivé ? A habiter des époques révolues et des villes où l’on n’a jamais mis les pieds. A vivre les tragédies qui vous ont épargné, mais aussi les bonheurs auxquels vous n’avez pas eu droit. A parcourir tout le clavier des émotions humaines, à vous éprendre et vous déprendre. A vous procurer la baguette magique de l’ubiquité. Plus que tout, à vous consoler de n’avoir qu’une vie à vivre. Avec, peut-être, cette chance supplémentaire de devenir un peu moins bête, et en tout cas un peu moins sommaire.”

Mona Ozouf, historienne, auteur de La Cause des livres (Gallimard)


Existant grâce à une idée de Nicolas I, à l'aide avisée de David, Michel et Nicolas II (merci à ces quatre mousquetaires !), ce blog permet de proposer et partager des lectures. Après une rage monomaniaque autour de la nouvelle, le blog tente une percée en direction du roman-fleuve. Ce genre fera l'objet d'une rencontre amico-littéraire à une date non encore précisée. D'ici là, d'ici cette promesse d'ouverture, écoute et échanges, proposons des titres, commentons les livres déjà présentés, dénichons des perles, enrichissons la liste conséquente des recueils de nouvelles.


Chers amis, chers lecteurs gourmands, je loue et vous remercie de votre appétit jubilatoire sans quoi cette petite entreprise serait vaine.

Bonne lecture à tous et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Isabelle

jeudi 7 avril 2011

Le temps où nous chantions

Auteur : Richard Powers (18 juin 1957)

Traduit de l'américain par Nicolas Richard
Editions10/18. Domaine étranger.

Allez, c'est parti ! Voici ma première contribution à ce blog.

Il s'agit d'un livre offert par ma grande soeur à Noël. J'avais tout d'abord été attirée par la couverture (ma passion pour le cheveu court... allez comprendre) et finalement, j'ai été totalement captivée par la lecture de ce livre.

C'est l'histoire fort singulière d'une famille américaine des années trente aux années 70 en gros. Mais il ne s'agit pas de n'importe quelle famille ! Le père est juif allemand fraîchement émigré d'Allemagne, fuyant le régime nazi, lorsqu'il rencontre sa future femme, noire américaine issue d'une longue lignée d'esclaves. Et ce couple très improbable va se marier et avoir 3 enfants. L'autre particularité est que tous les membres de cette famille ont la musique chevillée au corps, et qu'ils ne vont vivre que par et pour elle.
Tout au long de ces pages, on accompagne le narrateur et les autres personnages dans la recherche de leur identité : noirs ? blancs ? métisses ? américains ? européens ? chanteurs ?... Sans compter que la société se chargera bien vite de leur coller des étiquettes afin qu'ils ne dérangent pas trop.

Ce livre m'a aussi rappelé à quel point la ségrégation raciale aux Etats-Unis d'Amérique a été violente et dure.
Et pour finir, Richard Powers parle merveilleusement bien de la musique, des émotions et des sensations qu'elle procure. Comme le dit la quatrième de couverture : des pages inoubliables sur la musique !
Ce livre m'a transportée, bouleversée, bref, j'ai adoré. Comme le dirait une personne chère à mon coeur : c'est un petit chef d'oeuvre ;)

A lire de toute urgence donc.

Emmanuelle

http://www.rue89.com/cabinet-de-lecture/2011/03/24/generosite-de-richard-powers-la-litterature-des-genes-196670

http://www.evene.fr/celebre/biographie/richard-powers-15748.php

http://livres.fluctuat.net/richard-powers.html

http://livres.fluctuat.net/richard-powers/livres/le-temps-ou-nous-chantions/2177-chronique-le-temps-ou-nous-chantions-richard-powers.html

http://passouline.blog.lemonde.fr/2006/11/18/richard-powers-consacre/

1 commentaire:

  1. Bien inspirée par le commentaire de ma soeur Emmanuelle ainsi que par le sujet, je me suis plongée dans cet impressionnant pavé. Fort de ses 1037 pages, il s'agit en effet du type du roman-fleuve-Amazone ! J'en suis sortie hier, heureuse de cette traversée, révoltée et souvent mise très mal à l'aise par la violence subie par les Noirs, écoeurée par la dureté de la ségrégation raciale. La ségrégation, oui, bien sûr, je savais, mais de loin, de manière intellectuelle, distancée, prudente, protégée. Ce livre m'a permis de me pencher sur ce scandale absolu, cet enfer. Ce matin, à la radio, on a entendu parler d'un Noir américain condamné à la peine de mort pour un crime qu'il a toujours nié avec la plus grande fermeté. Il est en prison depuis 30 ans. Sa peine a été commuée en réclusion à perpétuité.
    Qu'ai-je aimé ? Certains passages sur la musique, notamment les passages traitant des sensations. Et quelle érudition ! L'auteur nous fait traverser tous les styles et les grandes aventures des interprètes depuis 40 ans.
    J'ai également beaucoup apprécié toute la partie centrale, celle où le narrateur Joey est seul et où il a cette expérience de chanteur en Europe. De même toute la fin avec sa soeur Ruth. La scène de la musique en famille chez le grand-père m'a bouleversée. Car tout cela est vivant. Par contre, j'ai trouvé le début du livre artificiel, voire froid. Le personnage de Jonah me semble manquer de crédibilité. Quel corps a-t-il ? Paradoxalement, classé "Noir", il erre comme un fantôme exsangue. La mort de Delia puis celle de Jonah m'ont également paru traitées de façon artificielle et presque agressive par leur distanciation.
    Ce livre créant des rapports passionnants entre musique et temps vaut vraiment le coup de ne pas se laisser décourager par son début peu aimable.
    Le couple Delia-Da est, inversé, ce couple que je voyais à Cergy en 1985. Elle, grande, d'une blondeur de blé, aux longs cheveux irradiant le soleil. Lui, noir de jais, beau comme un dieu antique, une sorte de Salomon à la peau de lumière sombre. Ils ne POUVAIENT PAS passer inaperçus et ne le cherchaient d'ailleurs pas. Je les revois, enlacés, riant, avec trois chefs-d'oeuvres métissés autour d'eux. Je me rappelle alors les avoir enviés. J'espère qu'ils n'auront vécu le calvaire de Da et Délia. J'espère qu'ils vont bien.

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