“A quoi sert d’être cultivé ? A habiter des époques révolues et des villes où l’on n’a jamais mis les pieds. A vivre les tragédies qui vous ont épargné, mais aussi les bonheurs auxquels vous n’avez pas eu droit. A parcourir tout le clavier des émotions humaines, à vous éprendre et vous déprendre. A vous procurer la baguette magique de l’ubiquité. Plus que tout, à vous consoler de n’avoir qu’une vie à vivre. Avec, peut-être, cette chance supplémentaire de devenir un peu moins bête, et en tout cas un peu moins sommaire.”

Mona Ozouf, historienne, auteur de La Cause des livres (Gallimard)


Existant grâce à une idée de Nicolas I, à l'aide avisée de David, Michel et Nicolas II (merci à ces quatre mousquetaires !), ce blog permet de proposer et partager des lectures. Après une rage monomaniaque autour de la nouvelle, le blog tente une percée en direction du roman-fleuve. Ce genre fera l'objet d'une rencontre amico-littéraire à une date non encore précisée. D'ici là, d'ici cette promesse d'ouverture, écoute et échanges, proposons des titres, commentons les livres déjà présentés, dénichons des perles, enrichissons la liste conséquente des recueils de nouvelles.


Chers amis, chers lecteurs gourmands, je loue et vous remercie de votre appétit jubilatoire sans quoi cette petite entreprise serait vaine.

Bonne lecture à tous et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Isabelle

samedi 17 mars 2012

1Q84

Auteur : Haruki Murakami (1949-)
Traduit du japonais par Hélène Morita
Editions Belfond
 

Ce livre est un succès qui a dépassé tous les records de vente connus au Japon. Trois volumes sont parus avec 1670 pages au total, ce qui en fait donc une œuvre éligible à la catégorie "fleuve".
L’auteur, Haruki Murakami, jeune sexagénaire et marathonien, est arrivé à la littérature par la tragédie grecque qu’il a étudiée à l’université (improbables Japonais !), par la traduction et… par le jazz dont il a dirigé un club. Dans son œuvre abondante, on citera des titres baroques comme « Les Amants du spoutnik » ou « L’Eléphant s’évapore ».
Pour introduire ce titre bizarre, précisons que les caractères japonais Q et 9 se prononcent de la même façon et que le roman se passe en 1984, référence orwellienne, et au Japon bien sûr. Mais la réalité devient parfois un peu floue et les personnages se demandent peu à peu s’ils n’ont pas subrepticement glissé dans un autre espace, double, 1Q84.
Il est évidemment hors de question pour moi de vous dévoiler quoi que ce soit de l’intrigue afin de préserver votre futur plaisir. Je dirai seulement que l’auteur décrit en parallèle la vie de chacun des deux héros par chapitres alternés, parti pris qui suggère évidemment l’idée de deux mondes parallèles, et que progressivement il distille les pièces du puzzle qui nous dévoile leur passé, leurs blessures et ce qui va rapprocher à nouveau leur destin après vingt ans de séparation.
Sur fonds de secte dangereuse, ce roman crypté et onirique met en scène une belle jeune fille karatéka mystérieuse et vengeresse des femmes violées, et un professeur de mathématiques écrivain, tous deux solitaires et nostalgiques de leur rencontre sur les bancs de l’école.
Le style est précis, d’un réalisme presque clinique, plutôt court en phrase mais riche en mots et contribue à nous mettre dans l’ambiance particulière du récit et à nous tenir en haleine par les découvertes successives que nous faisons de la vie des héros. L’histoire complexe avec meurtres, disparitions, suspens, ressemble aussi à un roman policier. Dans la vie quotidienne banale des personnages s’immiscent progressivement des dimensions surréalistes inattendues.

Citons quelques phrases, quelque peu absconses, révélatrices de la manière de l’auteur :
« Le passé – tel qu’il était peut-être – fait surgir sur le miroir l’ombre d’un présent – différent de ce qu’il fut ? »
« Il ne faut pas se laisser abuser par les apparences, il n’y a jamais qu’une réalité »
« Les choses qui restent enfermées dans notre cœur n’existent pas en ce monde. Mais c’est dans notre cœur, ce monde à part, qu’elles se construisent pour y vivre »


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