“A quoi sert d’être cultivé ? A habiter des époques révolues et des villes où l’on n’a jamais mis les pieds. A vivre les tragédies qui vous ont épargné, mais aussi les bonheurs auxquels vous n’avez pas eu droit. A parcourir tout le clavier des émotions humaines, à vous éprendre et vous déprendre. A vous procurer la baguette magique de l’ubiquité. Plus que tout, à vous consoler de n’avoir qu’une vie à vivre. Avec, peut-être, cette chance supplémentaire de devenir un peu moins bête, et en tout cas un peu moins sommaire.”

Mona Ozouf, historienne, auteur de La Cause des livres (Gallimard)


Existant grâce à une idée de Nicolas I, à l'aide avisée de David, Michel et Nicolas II (merci à ces quatre mousquetaires !), ce blog permet de proposer et partager des lectures. Après une rage monomaniaque autour de la nouvelle, le blog tente une percée en direction du roman-fleuve. Ce genre fera l'objet d'une rencontre amico-littéraire à une date non encore précisée. D'ici là, d'ici cette promesse d'ouverture, écoute et échanges, proposons des titres, commentons les livres déjà présentés, dénichons des perles, enrichissons la liste conséquente des recueils de nouvelles.


Chers amis, chers lecteurs gourmands, je loue et vous remercie de votre appétit jubilatoire sans quoi cette petite entreprise serait vaine.

Bonne lecture à tous et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Isabelle

dimanche 5 septembre 2010

Histoire universelle de l'infamie

Auteur : Jorge Luis Borges (1899-1986)

Traduction de l'espagnol par Eduardo Jimenez
Editions 10/18 ou édition bilingue Langues pour tous

Parce qu'il s'appuie sur des documents préexistants vrais ou fictifs, voici un livre singulier qui ne cesse de flirter avec la supercherie, le mensonge et les faux-semblants. Le titre m'a longtemps fait peur et bien que ce recueil soit le préféré de Christophe, j'ai mis très longtemps à m'y plonger. On cotoie des canailles de toutes espèces dans ces nouvelles passionnantes par l'originalité de leur sujet et de leur écriture. Jorge Luis Borges nous agrippe par le sens de la formule - "C'était un individu d'une sottise paisible. En bonne logique, il aurait pu (et dû) mourir de faim."- et par une certaine désinvolture très élégante. Par la poésie, par son talent pour raconter à l'emporte-pièce et encore ouvrir des tiroirs, découvrir des abîmes. Son érudition est légère, virevoltante, étourdissante.

J'ai depuis longtemps dans ma bibliothèque un livre intitulé Le mythe des 47 rônins. Jamais ouvert. La nouvelle L'incivil maître de cérémonies, Kotsuké no Suké relate précisément  l'histoire de ce livre et me donne la grande envie d'enfin aérer ses pages.

Voilà encore un paradoxe. Ce livre se lit vite. Sitôt lu, il donne l'envie de recommencer pour comprendre ses secrets littéraires. Les deux préfaces sont des petites perles.

Isabelle

http://fr.wikipedia.org/wiki/Jorge_Luis_Borges

http://www.franceculture.fr/oeuvre-histoire-universelle-de-l-infamie-de-jorge-luis-borges.html

3 commentaires:

  1. De Christophe le 08/04/08

    Oué, j'suis premier! Prems! Je n'ai pas la même couverture, mais bon, on s'en fiche, hein? Ce sont des impostures, qui racontent des histoires d'imposteurs: cest tout Borges ça. Comme un Dante qui aurait dit: passé cette limite (la première page, par exemple), laissez là tout espoir de ne pas être mené en bateau. Voilà des personnages infâmes, pour la plupart, dont la vie resemble de près à clle des vrais infâmes: il ne sont pas châtiés au terme d'un récit édifiant, mais vivent et meurent comme tout le monde, dans une forme d'impuité mêlée d'arbitraire. Tel meurt d'une pneumonie, qui mériterait d'être pendu, tel meurt de sa belle mort, tel autre par hasard. Si il y a une justice, elle n'est pas sur terre. Autant dire, pour les incrédules, qu'une vie d'infâmie vous tend les bras, si vous souhaitez une vie sortant du trai-train. Au passage, bien sûr, la nature humaine reçoit de bonnes mornifles. Le tout empaqueté vite fait bien fait: l'homme est un virtuose de l'écriture, et vlan, prends-moi cet arpège dans les dents. Amusez vous bien

    RépondreSupprimer
  2. De Christophe le 05/05/08

    El incivil maestro de ceremonias Kotsuké no Suké. En toute mauvaise foi, j'ai décidé que cette nouvelle serait la meilleure de toutes celles que j'ai lues à ce jour. Je dois donc me justifier un minimum, après une telle affirmation. D'abord, il y est question de Vanité, et, pour moi, la vanité est le thème inhérent au genre, court, de la nouvelle. Vanité et sa petite soeur l'ironie sont entre les bonnes mains de BORGES. Il réussit, en quelques lignes, à nous faire adhérer à un monde et à un système de valeurs tout à fait lointain, avant, tel un judoka, de nous renvoyer au tapis, avec tout l'élan de notre conscience. Au passage, il nous venge, d'un coup de sabre, de tous ces crétins qui nous font de sales remarques et à qui on se sent obligé de répondre gentiment par un sourire. Le style, l'humour, l'humanité (même féroce) de l'auteur éclatent dans un récit plus qu'efficace. Il sous-entend cependant,et c'est peut-être cela qui rejoint ma sensibilité chrétienne, que si l'homme devait assumer seul sont déshonneur (par un suicide, comme le passant de l'histoire), les suicidés tomberaient comme des mouches. L'honneur serait sauf, quand tout le monde serait mort! Avis aux amateurs...

    RépondreSupprimer
  3. De Nicole le 20/07/08

    Infamie ou ignominie, abomination, déshonneur, honte, abjection , bassesse, trahison, cruauté, injustice ... Borges ne nous épargne rien, et ses biographies apparemment délirantes nous rappellent que l'être humain n'a pas à se montrer toujours fier de lui si on se souvient que l'auteur a "romancé" la vie de personnages ayant réellement existé. Lecture qui ne peut laisser indifférent.

    RépondreSupprimer